Prévisions pour 2015

Banques centrales, pétrole, Ukraine… quelques prévisions financières pour 2015

James Howard Kunstler

Voici mes prévisions financières pour 2015 :

Début 2015, la BCE propose un programme d’assouplissement quantitatif de piètre ampleur qui déclenche les railleries. Les marchés européens s’écroulent.
Résultat des élections grecques en janvier : un gouvernement qui tient tête à l’UE et à la BCE. Cela provoque une perte de confiance fatale dans la capacité de poursuivre ce projet.


Au second semestre 2015, le reste du monde se ligue contre le dollar américain.
Les marchés obligataires en Europe implosent au premier semestre et la contagion s’étend aux Etats-Unis à mesure que la peur et la méfiance augmentent sur la viabilité du statut des Etats-Unis comme zone sécurisée.

D’innombrables trous noirs apparaissent, dans lesquels la dette et la « richesse » disparaissent à jamais
Les produits dérivés associés aux monnaies, les taux d’intérêt et les obligations à risque déclenchent un bain de sang dans les credit default swaps (CDS). D’innombrables trous noirs apparaissent, dans lesquels la dette et la « richesse » disparaissent à jamais.

Les marchés américains continuent leur ascension au premier semestre 2015 mais s’effondrent au troisième trimestre lorsque la confiance dans le papier et les pixels s’effrite. Le Dow Jones et le S&P perdent entre 30 et 40 points lors du krach initial et la chute continue en 2016.
L’or et l’argent-métal dégringolent au premier semestre, puis décollent lorsque la dette et les marchés actions s’effondrent, la confiance dans les instruments abstraits s’évapore, la foi dans l’omnipotence de la banque centrale disparaît et les citoyens du monde entier recherchent désespérément de la sécurité dans la guerre des monnaies.
Goldman Sachs, Citicorp, Morgan Stanley, Bank of America, Deutsche Bank, Société Générale, tous succombent à l’insolvabilité. Le gouvernement américain et les responsables de la Réserve fédérale n’osent pas se porter à leur secours une nouvelle fois.
Fin 2015, les banques centrales du monde entier se retrouvent dans un discrédit généralisé. Aux Etats-Unis, le mandat de la Réserve fédérale est publiquement débattu et rapporté à sa mission initiale en tant que prêteur de dernier recours. Il lui est interdit de s’engager dans d’autres interventions et un nouveau mécanisme, moins obscur, est élaboré pour réguler les taux d’intérêt de base.
En mai 2015, les prix du pétrole se situent à nouveau entre 65 $ et 70 $. Cela ne suffit pas pour stopper la destruction dans les secteurs du gaz de schiste, du sable bitumeux et du forage en eau profonde. Alors que la contraction de l’économie mondiale s’accélère, le pétrole dégringole autour des 40 $ en octobre…
… à moins que des troubles au Moyen-Orient (en particulier si l’Etat islamique s’attaque à l’Arabie Saoudite) ne conduisent à une grave — et peut-être fatalement permanente — perturbation des marchés mondiaux du pétrole. Dans ce cas, sont remises en question la continuité des économies avancées ainsi que la paix entre les nations.

L’événement marquant de l’année 2015 sera la désintégration de l’économie mondiale

Géopolitique 
L’événement marquant de l’année 2015 sera la désintégration de l’économie mondiale de Tom Friedman, c’est-à-dire les relations commerciales et bancaires que nous avons connues pendant près d’un quart de siècle, en particulier le flux continu de biens et de capitaux entre l’Orient et l’Occident. Les erreurs tactiques des Etats-Unis et de leurs alliés européens incitent les soi-disant marchés émergents, menés par l’Organisation de coopération de Shanghai, à élaborer des solutions de rechange pour saper et éviter le commerce en dollars.

(…)

Si elles ne remplacent pas vraiment le dollar en tant que réserve de monnaie mondiale, ces alternatives entraînent une période de troubles monétaires au niveau mondial. Le seul moyen de s’en sortir est d’adosser au moins partiellement les monnaies à l’or. La Chine et la Russie continuent de convertir leurs réserves de dollars en or dès que cela leur est possible. Entre temps, la campagne menée par les Etats-Unis et la Grande-Bretagne pour discréditer et dévaluer l’or ne fait que permettre à leurs rivaux d’acquérir encore plus d’or, à un prix encore plus bas.

Le reste du monde en a assez des manigances interventionnistes des Etats-Unis et de l’exportation de leur stupide culture des hamburgers, de Grand Theft Auto et de leurs Jézabel qui « twerkent ». Il faut dire que la stupidité tenace de l’Amérique et ses mauvais choix stratégiques — comme par exemple le retour de flammes de la mésaventure ukrainienne de 2014 — n’aident pas. Qui à la Maison Blanche, au Pentagone ou au Département d’Etat pensait que c’était une bonne idée de mettre à mal la fragile stabilité de l’Ukraine ? Doute-t-on réellement que l’Ukraine puisse un jour être en dehors de la sphère d’influence de la Russie ? Ou que la Russie l’autoriserait à être rattachée à l’OTAN et utilisée comme base avancée pour la puissance de feu américaine ? A ce sujet, l’explication de Dmitry Orlov est la plus pertinente que j’ai trouvée sur internet :

« Ce pour quoi les anglo-impérialistes ont payé en corrompant la politique de l’Ukraine a été une place au premier rang pour assister à une guerre ouverte entre l’Ukraine et la Russie. A la place, ils n’ont obtenu qu’un tabouret bancal pour assister à un pugilat entre l’Ukraine occidentale et l’Ukraine orientale ».

Les Etats-Unis ont réussi à transformer un pays légèrement en faillite, légèrement indépendant en un cas totalement désespéré de retour à l’âge des ténèbres

Les Etats-Unis ont réussi à transformer un pays légèrement en faillite, légèrement indépendant en un cas totalement désespéré de retour à l’âge des ténèbres — pas d’argent, pas de travail, pas d’essence, pas de chauffage, pas de nourriture, pas de perspectives d’avenir.

Ayant complètement bâclé l’opération et mal joué par rapport à la Russie de Poutine — et l’intérêt légitime de la Russie à avoir un proche voisin stable — les Etats-Unis abandonneront l’Ukraine. On l’oubliera aussi sûrement qu’on a oublié le rôle des forces aériennes ukrainiennes soutenues par les Etats-Unis dans le crash du vol 17 de la Malaysian Airlines — des détails compromettants qui ont été enterrés par les enquêteurs hollandais. Finalement, les Russes devront secourir l’Ukraine agonisante. Ils n’en seront pas ravis mais ils le feront, bien à contrecoeur.

De même, la campagne menée par les Américains pour des sanctions économiques à l’encontre de la Russie (y compris l’attaque contre le rouble) se retourne à présent contre les exportations de la Zone euro. La Russie a survécu à bien pire que les sanctions occidentales dans l’histoire récente. Elle survivra en se tournant vers l’Asie. C’est déjà en train d’arriver et ce phénomène est largement médiatisé. Pour l’Europe, cela signifie que tôt ou tard elle perdra son accès au gaz et au pétrole importés de Russie.

Entre temps, les champs pétroliers de la Mer du Nord et de Groningen se meurent. Bon courage aux Européens pour se chauffer l’hiver prochain…

Nous verrons la suite dès mercredi…

James Howard Kunstler est l’auteur du best-seller La fin du pétrole, paru en 2005, qui prédisait l’effondrement financier et les implications du problème du Peak oil. Il est également l’auteur de livres sur l’urbanisme et l’échec des banlieues américaines — des ouvrages devenus cultes chez les urbanistes et les architectes. M. Kunstler est également l’auteur de 10 romans. Ses articles sont parues dans le New York Times, le Washington Post, Rolling Stones et dans le Atlantic Monthly.

Source : http://la-chronique-agora.com/banques-centrales-petrole-ukraine/



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