Les neurones de la foi

Jean-Louis Servan-Schreiber

Le jeune moine tibétain entre en méditation avec quelques électrodes autour du crâne. Au moment où il approche un sentiment d’unité avec le cosmos, il effleure un signal qui déclenche un scan de son cerveau. Les chercheurs de l’université de Pennsylvanie qui organisent ces observations appellent leur nouvelle discipline la « neurothéologie ». Ils disent avoir ainsi localisé la zone temporale d’où émane notre sentiment habituel d’être distinct de tout ce qui nous entoure.

Les méditants avancés parviennent à mettre cette dernière en sommeil et ne perçoivent plus alors la frontière entre eux et le reste de l’univers.

D’autres expériences menées sur des moniales franciscaines, décrivant une proximité avec Dieu pendant leurs prières, pointent vers des manifestations identiques dans leurs neurones. Des recherches japonaises ont également montré que certains rythmes répétés agissent sur l’hypothalamus et peuvent nous plonger dans la sérénité.

Pour les neurothéologiens, le sentiment que Dieu existe serait ainsi programmé dans l’architecture même de nos cerveaux. L’un d’entre eux, le docteur Newberg, a même intitulé son dernier livre « Pourquoi Dieu n’est pas près de disparaître ».

On imagine les nouveaux débats soulevés par ces observations. Pour les athées, le fait de pouvoir provoquer à volonté un état mystique en inhibant une zone du cerveau, apporte la démonstration éclatante qu’il ne s’agit que d’un processus matériel, sans aucune portée transcendante. Avoir ou non la foi relèverait seulement d’une sensibilité plus ou moins grande à ces chimies intérieures. Même si c’était le cas, répliqueront les croyants, qui a voulu cette configuration subtile de notre cortex ? La question métaphysique, par nature, se dérobe à la preuve. Dans ce domaine, la croyance prend forcément le pas sur la connaissance.

Mais dans les applications quotidiennes, on peut imaginer que des substances vendues en pharmacie nous offriront, tous les dimanches, l’extase religieuse sans s’encombrer de rituels. Les consommateurs de champignons hallucinogènes et de LSD ne nous avaient-ils pas déjà décrit quelque chose de comparable ?

Un bonheur ne venant jamais seul, on apprend que des chercheurs, forcément anglais, ont repéré le centre cérébral de l’humour, la zone du cerveau qui fait rire. Bientôt les gélules pour s’esclaffer ?

Meilleure nouvelle encore, cette possibilité de stimuler directement une zone de la colonne vertébrale et de s’offrir ainsi un orgasme immédiat.
Croire, rire ou jouir tout seul et à volonté. Peut-être finirons-nous par nous passer tout à fait des autres.

Source : http://www.psychologies.com/Culture/Spiritualites/Religions/Articles-et-dossiers/Les-neurones-de-la-foi

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